Bonjour à tous,
« Alors ma douce enfant, que penses-tu de ces témoignages de femmes autistes sans déficience intellectuelle ? », me demande Ariel.
J’ai lu que les signes de l’autisme étaient moins évidents chez ces personnes.
« Effectivement. Elles se fondent facilement dans la masse. Elles sont des reines de l’adaptation. »
Lol ! Méchant Ariel !
« Sur toute une partie du spectre autistique, des éléments concrets et flagrants permettent de déceler tôt des particularités plus ou moins handicapantes.
Mais à l’extrémité de ce même spectre, on trouve des personnes qui ne présentent pas de déficience intellectuelle voire disposent parfois d’une intelligence supérieure à la normale. Des personnes qui rencontrent des difficultés sur le plan social pour des raisons apparaissant diverses.
Toutefois, certaines sont capables de combler ces difficultés, au moins partiellement. Ces personnes-là peuvent mener ce qui vous apparaît comme une vie normale. Un temps. Avec un sentiment de décalage qui grandit à mesure que les années passent. «
Je suis une Asperger ?
« As-tu besoin de ce titre ? »
Je veux juste comprendre jusqu’au bout. C’est tout, c’est mon seul but, comprendre.
« Tu intellectualises tellement de choses. »
C’est avec ma tête que je comprends. Je décortique et alors je comprends. J’ai toujours fait comme ça.
« Oui, c’est ainsi que tu procèdes pour t’adapter à toutes les situations. »
Tu as une manière particulière d’observer. Tu ne regardes jamais tout dans son ensemble. Tu captes un détail, un autre, un autre etc…
En outre, que des petits détails en apparence anodins. Seulement ces petits détails te permettent ensuite dans ta tête de constituer un semblant de paysage, grossier, approximatif.
Et à partir de ce paysage approximatif, tu parviens miraculeusement à comprendre puis analyser toute une situation.
Tu t’es perdue à New York, à Bangkok, tu parles un anglais loin d’être parfait et pourtant, dans les deux cas tu as pu trouver du monde pour t’aider.
Et cette femme en Italie avec qui tu as pu sympathiser le temps d’un déjeuner ? Elle ne parlait qu’italien, une langue que tu ne connais absolument pas.
Et ce couple russe parlant eux aussi un anglais très approximatif ?
Cela parait anodin. De simples exemples. Tu ne le sais pas mais il est difficile de dépasser la peur. »
Si je le sais.
« Non. Pourquoi d’autres ne se sont pas perdus à New York ? »
Je pense que les autres avaient eu la bonne idée d’écouter les consignes de la guide !
« Pourquoi d’autres ne se sont pas perdus à Bangkok ? »
Ils sont restés en groupe…
« Pourquoi étais-tu seule ? »
J’aime être seule. J’aurais pu ne pas l’être ce jour-là mais j’ai fait en sorte de me trouver seule.
« Seule à Bangkok ? »
Et alors, je n’ai pas peur d’explorer, j’aime ça.
« Pourquoi n’avais-tu pas écouté la guide ? »
Je n’aime pas les consignes. C’est dur les consignes. C’est limitant. Même quand elles sont nécessaires elles me paraissent limitantes.
J’étais en vacances, je n’étais plus prête à suivre toutes les consignes.
« Tu ne crains pas ce qui peut se passer si tu ne les suis pas ? »
Je les suis la majorité du temps. Jusqu’au moment où j’ai besoin de mon espace afin de pouvoir lâcher la bride si tu veux.
« Voilà. Quelle bride ? »
S’adapter à toutes les situations demande un effort constant. C’était pour cette raison que je voulais vivre seule depuis longtemps.
« C’était prendre le problème dans le mauvais sens. Fais-tu toujours autant d’effort ? »
Je tends à lâcher.
« Pourquoi ? »
Je vis avec quelqu’un qui ne me demande jamais d’agir différemment ou penser autrement. Et qui a même trouver le moyen de s’adapter à ma manière d’être.
La seule autre personne qui avait fini par agir ainsi est ma mère.
« Parce qu’elle a su voir tous tes masques sociaux dès le départ. »
Je sais.
« Pourquoi est-ce agréable d’explorer de nouveaux endroits ? »
Parce qu’ils sont nouveaux. Il y a plein de choses à découvrir, plein de détails à capter. Il y a une lumière différente, une ambiance différente, des couleurs particulières et tout le reste qui est concret et matériel.
« Pourquoi n’as-tu pas peur ? »
Je connais la peur. Je la connais bien. Je sais juste que vivre c’est oser. Alors j’ose. Je suis à Bangkok, j’ai l’opportunité de découvrir et je vais prendre un taxi qui va me ramener en 3 secondes à l’hôtel ?
Mais je ne verrai pas la ville ! Il faut aller à pieds, marcher et regarder.
Oui je me suis perdue. Je savais comment revenir sur mes pas ceci dit. J’aurais pu le faire et rentrer en taxi.
Seulement c’est à pieds qu’on explore.
Je ne parle pas Thaï. Heureusement que j’ai un joli sourire.
« Pourquoi tu ne remarques pas les gens qui te regardent dans la rue ou autour de toi ? Pourquoi tu ne te souviens jamais des visages ? »
Je n’en sais rien. Je suis souvent dans la lune c’est peut-être pour ça. Même quand je conduis je suis dans la lune. C’est comme ça que je me concentre le mieux, en étant dans la lune.
Je peux tenir une conversation et être loin en pensée. Je le fais souvent d’ailleurs.
En fait c’est simple, les pires moments sont ceux où je ne peux pas m’évader mentalement. C’est comme un besoin en fait…
« Tu n’es pas dans la lune. Pas aussi souvent que tu le penses. Pas quand tu fais plusieurs choses en même temps avec efficacité.
Tu as une autre façon de vivre cette réalité, c’est cela l’autisme de haut niveau.
Une autre façon de vivre votre réalité. Ces fameux détails que tu captes sans t’en rendre compte, la majorité des gens passent dessus. Ils regardent la situation dans son ensemble.
Regarder la situation dans son ensemble permet de déceler et comprendre les codes sociaux.
C’est ce qui importe pour une majorité.
Ce qui compte pour toi c’est de savoir comment imiter. Tu ne veux pas comprendre les codes. Tu veux juste savoir comment les singer. Tu ne veux pas les intégrer.
Tu prends juste ce dont tu as besoin pour survivre dans un milieu donné.
Ce qui est important pour toi c’est de trouver partout un espace à toi, pour être toi.
Toutefois, le temps passe et le besoin de cet espace à toi grandit. De quelques minutes par jour quand tu étais en fin d’adolescence, il est passé à plusieurs heures par jour.
Le décalage, tu n’as plus envie de supporter.
Cela est normal.
Tu as été apaisée en rencontrant quelqu’un qui te comprenait. Et qui t’a aidé à accepté ta façon différente de vivre votre réalité.
Tu comprends pourquoi nous t’encourageons à creuser ton idée d’entreprise ? »
Je comprends. Merci Ariel.
Bonne journée à tous
Ho
3 décembre, 2020 à 23:08
Bonjour Sylvie,
j’aime beaucoup!
Je trouve qu’on voit une belle histoire dans ton article. L’histoire de ton épanouissement, de ton ouverture. Des combats à la paix
Bises
crystallia
4 décembre, 2020 à 1:46
Bonjour Ho,
Merci beaucoup !
Bise
Emilie
2 décembre, 2020 à 15:21
Bonjour Sylvie,
Ariel a toujours les mots justes ! c’est évidemment plus facile de parvenir à s’adapter quand on comprend après avoir tout décortiqué grossièrement. Néanmoins, un rond finira par souffrir de rester dans un carré, d’autant plus que l’adaptation et la souffrance sont énergivores sur le long terme. Projet de sortir des sentiers battus pour bâtir une place qui te ressemble ?
crystallia
4 décembre, 2020 à 1:47
Bonjour Emilie,
Toi aussi, tu tombes toujours juste.
Bise
Pascale
2 décembre, 2020 à 7:19
Bonjour Sylvie,
Très heureuse de te lire à nouveau. Et quel texte !
Je te souhaite plein de projets en toute liberté dans tes différents espace-temps.
Bise
Pascale
2 décembre, 2020 à 7:19
Bonjour Sylvie,
Très heureuse de te lire à nouveau. Et quel texte !
Je te souhaite plein de projets en toute liberté dans tes différents espace-temps.
Bise
crystallia
4 décembre, 2020 à 1:48
Bonjour Pascale,
Contente de vous retrouver tous aussi.
Merci à toi.
Bise